SENSIBILISATION / FORMATION

[DOSSIER Les fresques] LES FRESQUES AU SERVICE D’UNE COMMUNICATION ET D’UN MARKETING RESPONSABLES 2/2

Février 2024

Les ateliers de type “fresque” se déploient à toute allure depuis quelques années après le succès pionnier de la Fresque du Climat. Si elles restent avant tout un outil de sensibilisation, les fresques qui arrivent désormais sur le marché se veulent aussi être un moyen de mettre les entreprises en transition en proposant de véritables leviers d’action.

L’offre de fresques est foisonnante. Quelques sites tentent de lister l’ensemble des fresques existantes. Sur son site, La Fresque du Climat recense 71 “fresques amies”. Ailleurs, un document de travail participatif recense lui plus de 120 fresques existantes. Dans cet écosystème riche, il est parfois difficile de s'y retrouver. Sans prétendre être exhaustif sur les fresques existantes en matière de marketing et communication, ce dossier revient sur quatre fresques ayant pour objectifs de sensibiliser sur les impacts de ces métiers et d’apporter des solutions, notamment à celles et ceux qui les pratiquent au quotidien. Après la Fresque des Nouveaux Récits et la Fresque de la Communication dans la première partie de ce dossier, focus sur la Fresque du Marketing et la Fresque de la Publicité.

Une fresque qui réinvente le marketing

A l’instar de la Fresque de la Communication, la Fresque du Marketing n’intègre pas le terme “responsable” dans son intitulé. Et pour cause, c’est exactement la même raison qui a poussé les concepteurs de cette fresque à ne pas parler de “marketing responsable”. Ainsi la Fresque du Marketing, évoquée dans un précédent article, se présente comme un véritable levier de la transition et entend instaurer le standard du marketing de demain. 

Dans le déroulé de l'atelier, les participantes et participants de cette fresque sont invités tour à tour à décrire d’abord la chaîne de valeur du marketing et ses dérives. Ensuite, tout l’enjeu est d’arriver à reconstruire une chaîne plus vertueuse pour contrecarrer les impacts négatifs, environnementaux et sociaux, du marketing traditionnel.

La Fresque du Marketing a été pensée par l’association professionnelle Adetem en collaboration avec le média et organisme de formation Youmatter à l’origine, quelque temps auparavant, de la Fresque de la Publicité. Cette fresque permet aux professionnels du marketing, et plus globalement toute personne impliquée dans la création de nouvelles offres au sein d’une entreprise de repenser l’approche pour aller vers des modèles plus vertueux. « Nous voulions un outil de référence » précise Catherine Réju, directrice générale de l’Adetem et membre du comité de programme du Congrès de la Communication et du Marketing responsables 2024.

Pour cela, l’Adetem s’est entourée de beta testeurs « pas forcément acquis à la cause » comme les associations Halte à l’Obsolescence Programmée et Pour un Réveil écologique. « Nous savons que l’expression “marketing responsable” peut parfois être perçue comme un oxymore. » ajoute Catherine Réju,« c’est pour cela que nous avons choisi des beta testeurs exigeants qui nous ont permis de valider nos hypothèses et faire évoluer la fresque ». 

La Fresque du Marketing a obtenu, via la contribution de Valérie Martin, le soutien officiel de l’ADEME. Valérie Martin, Cheffe du service Mobilisation Citoyenne et Médias de l’ADEME, est, entre autres, co-autrice du Guide de la Communication Responsable avec Mathieu Jahnich. Ces deux figures de la communication responsable sont respectivement Présidente et Pilote du comité de programme du Congrès de la Communication du Marketing Responsables 2024.

Une fresque pour une nouvelle approche de la publicité

Mathieu Jahnich, chercheur-consultant indépendant a participé à la construction d’autres fresques, dont celle de la Publicité. La Fresque de la Publicité est un autre atelier qui interroge les métiers de la communication et du marketing. Pensée également par Youmatter, filiale de KissKissBankBank, en partenariat avec la régie publicitaire de TF1, la Fresque de la Publicité se présente, dans la lignée de la Fresque du Marketing, comme un outil permettant de partager le constat sur l’impact environnemental et plus globalement sur la consommation, des métiers de la publicité puis de trouver des leviers d’action. 

Valérie Martin, à l’instar d’autres personnes engagées, comme, de nouveau des membres du Collectif Pour un Réveil Écologique, ont testé cette fresque en amont de sa parution pour favoriser la mise en place d‘un outil le plus robuste possible.

Lancée en septembre 2022, cette fresque s'adresse à tous les professionnels de la publicité et de la communication. Toutes les parties prenantes d’une campagne publicitaire sont concernés par les enjeux traités dans la Fresque de la Publicité : la régie publicitaire, l’agence et l’annonceur. L’objectif est là aussi de comprendre la chaîne de valeur de la publicité, de définir la responsabilité environnementale et sociale de la publicité et savoir identifier des leviers d’action pour rendre les pratiques plus vertueuses. 

Les mécanismes pédagogiques utilisés, fondés sur l’intelligence collective, s’apparentent à ceux de la Fresque du Climat. « Cette fresque peut d’ailleurs tout à fait être complétée par une Fresque du Climat » explique Charles Hédouin, ingénieur pédagogique chez Youmatter et concepteur de la Fresque de la Publicité, « on ne détaille pas les enjeux climatiques dans la Fresque de la Publicité, nous faisons l’état des lieux de l’impact de la publicité et cherchons à comprendre collectivement comment les publicitaires peuvent activer des leviers pour réduire l’empreinte de leur activité. »

La première partie permet de dérouler la fresque à l’aide de cartes établissant le constat et permettant d’obtenir des pistes d’action. La seconde partie construite sous forme d’atelier de travail consiste à inscrire les pistes d’action dans les pratiques de l’entreprise et proposer ainsi une feuille de route pour les mettre en place selon le degré d’impact et de difficulté.

Les limites des fresques

Les fresques font partie à l’heure actuelle de l’arsenal des outils déployables en entreprise d’une part et auprès du grand public d’autre part pour inviter tout un chacun à s’emparer des enjeux environnementaux et sociaux auxquels nous faisons face. 

Pour le grand public, elles constituent d’excellents moyens de diffusion massive des messages clés autour de ces enjeux. En général, lorsqu’une version grand public d’une fresque existe, le système d’animation proposé repose sur deux piliers :le bénévolat et la formation par les pairs. Ainsi, chaque personne ayant suivi une fresque peut ensuite être formée à l’animation par une personne habilitée à le faire par l’association porteuse. Après une ou deux séances d’observations, elle peut elle-même “fresquer”, c’est-à-dire organiser des sessions et animer la fresque en question auprès de participantes et participants volontairement inscrits.

Pour les fresques à destination des entreprises, les organisations porteuses d’une fresque suivent un cahier des charges plus strict pour autoriser des animatrices et animateurs à intervenir et en tirer un revenu. Ainsi, le parcours de formation à l’animation est en général plus complet et payant. L’enjeu étant pour les organisations créatrices des fresques d’être garantes de la qualité des messages diffusées auprès des entreprises et d'équilibrer leur modèle économique. 

Si aujourd’hui la méthode de diffusion de ces outils et leurs contenus constituent un bon premier pas pour favoriser la prise en compte des défis environnementaux, les fresques ne doivent en rien constituer une finalité. Pour Charles Hédouin de Youmatter « les fresques ne sont qu’un constat, derrière il faut une formation opérationnelle pour apporter réellement les moyens d’agir ». Mais pour l’heure, il constate que les entreprises ont souvent de la difficulté à aller au-delà de ces trois heures de fresque. 

«Trois heures dans l’emploi du temps des collaboratrices et collaborateurs c’est déjà beaucoup pour certaines entreprises. Pourtant, idéalement, il faudrait un accompagnement stratégique à la suite d’une fresque. » précise l’ingénieur pédagogique. Ainsi pour Charles Hédouin, le véritable risque des fresques : « c’est surtout de croire que ce serait suffisant pour se former ; or ce n’est pas vrai, ce sont de très bons outils pour s’éveiller aux enjeux de transition, mais une formation approfondie doit ensuite mettre l'entreprise en action. »

Pour Damien Pasquali, responsable développement et co-fondateur de la Fresque des Nouveaux Récits, même constat :« nous n’avons pas prétention de changer une personnalité en trois heures ». L’atelier vise plutôt à aider à donner les clés pour agir.« Surtout nous donnons aux gens les moyens d’agir à leur échelle ;nous leur montrons qu’ils peuvent eux aussi impulser le changement »insiste Damien Pasquali. 

Les entreprises doivent donc désormais réaliser encore un effort supplémentaire pour permettre à leurs collaboratrices et collaborateurs d’entrer dans des cycles de formation plus longs pour leur permettre d’obtenir toutes les clés pour favoriser la transition écologique de l’organisation. Une véritable formation aujourd’hui est un pas supplémentaire pour réconcilier l’entreprise avec le long terme, anticiper les nouvelles compétences indispensables à chaque secteur, et entrevoir ainsi comment s’adapter aux défis environnementaux et sociaux. Une clé de plus au service de la pérennité de l’activité des organisations.

A propos

Catherine Réju, Déléguée générale de l’Adetem est membre du comité de programme du Congrès de la Communication et du Marketing Responsables 2024,présidé par Valérie Martin, Cheffe du service mobilisation citoyenne et médiasde l’ADEME.

Charles Hédouin est Responsable Pédagogique chez Youmatter, média et organisme de formation créateur de la Fresque de la Publicité.

Auteur de l'article : Rémy Marrone pour le Congrès de la Communication et du Marketing Responsables

Le Congrès de la Communication et du Marketing Responsables est le rdv professionnel dédié à la transition écologique et solidaire des secteurs communication et marketing.
Organisé par Formule Magique, la prochaine édition se tiendra les 18 et 19 juin 2024 au Beffroi de Montrouge, Paris.
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